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Jean-Claude
GRESSET
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EN 1971, l'Orphelinat
devient “Foyer”. Le terme est assez imprécis, mais évoque
cependant une notion de sécurité.
La population accueillie est de deux types :
- Les cas sociaux, confiés par l'Aide
sociale à l'Enfance pour lesquels le juge des enfants a pris
une ordonnance de garde. Les difficultés familiales sont variées,
elles peuvent présenter des caractères de gravité dans certaines
situations.
- Les jeunes relevant de la Sécurité
sociale, c'est à titre médical qu'ils sont confiés à l'établissement
et présentent des troubles du caractère et du comportement.
En plus de l'éducation, ils relèvent de soins prodigués
à l'intérieur ou à l'extérieur. Le foyer est ouvert tous les
week-ends.
Les jeunes sont scolarisés à l'intérieur du foyer et dans
des établissements scolaires correspondant à leur niveau ou
leur motivation. C'est à cette époque que 30 élèves sont scolarisés
au collège de Longvic. Les professeurs se souviennent encore
des difficultés qu'engendrait un tel effectif.
L'encadrement est peu, pour ne pas dire pas formé en 1972.
Quelques apprentis continuent à bénéficier des compétences
de M. Chauvet à la menuiserie. Financièrement, l'établissement
a du mal à gérer les premiers “prix de journée” qui lui sont
versés ; des chapitres sont sous-estimés, d'autres surévalués.
Le directeur est jeune et sans expérience dans le domaine
de la gestion.
Au fil des années, l'équipe s'organise et se forme pour
arriver à sa forme actuelle : des éducateurs spécialisés diplômés,
médecin psychiatre, psychologue, infirmier, personnel administratif
et de services généraux, soit 40 salariés en 1993.
L'établissement opte pour une seule prise en charge :
celle des jeunes présentant des troubles du caractère et du
comportement. La cohabitation des deux catégories étant jugée
par l'autorité de tutelle comme génératrice d'ambiguïté.
Aujourd'hui, l'orphelinat est devenu “Institut éducatif
et thérapeutique”. Dans cette appellation, la notion de soins
s'affiche d'emblée. Il reçoit des jeunes, garçons et filles
de 6 à 20 ans, confiés par la Sécurité sociale qui en assure
le financement.
Il se pratique un hébergement en internat de semaine,
ainsi qu'en semi-internat pour six jeunes (filles en particulier).
Dans le cadre de l'établissement, nous disposons d'un
accueil de jour, structure destinée à prendre en charge des
jeunes qui ne peuvent à un moment donné supporter l'école.
Il s'y pratique un soutien scolaire et des activités à visée
thérapeutique.
Nous disposons également d'un service d'intégration progressive
pour les plus anciens. Ils sont soit apprentis ou en fin de
circuit scolaire. C'est l'apprentissage à l'autonomie.
Et enfin, en ce début 2000, le service d'éducation spéciale
et de soins à domicile pour onze jeunes. La prise en charge
se fait dans un cadre différent puisque les jeunes restent
dans leur famille.
Depuis l'époque de l'orphelinat, bien des choses ont changé
: disparition de l'encadrement religieux, création de nouveaux
locaux, formation du personnel, diversité de la prise en charge,
mixité.
Financements différents, et… ce qui demeure, c'est l'aide
que des adultes apportent à des jeunes en difficulté et en
cela, nous ne nous sentons pas différents de nos prédécesseurs,
ceux qui ont créé et fait marcher l'orphelinat.
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Père
Claude-Marie MILLET
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NOUS voilà déjà dans
notre cinquième année de présence à Domois et la recul du
temps nous permet d'apprécier le chemin parcouru. C'est une
histoire riche qui nous attache désormais à ce sanctuaire
dont notre évêque, le père Coloni, nous a confié la charge.
Notre communauté était alors à Brazey-en-Plaine lorsqu'il
nous a demandé si nous acceptions de changer de nomination
pour venir nous installer à Domois. Nous ne connaissions pas
grand'chose de ce lieu et de son sanctuaire. Ni plus ni moins
que la plupart des Côte-d'Oriens qui y venaient en pèlerinage
chaque année. Mais la perspective de servir la Vierge nous
a enchantés car elle correspondait à un profond désir qui
nous a toujours habité. Nous avons donc succédé aux pères
et frères du Sacré-Cœur dans cette institution fondée par
le père Chanlon.
Les premiers temps furent éprouvants. Le déménagement
d'une communauté comme la nôtre n'est pas chose facile. Les
aller-retour, les travaux d'aménagement, la reprise des nombreuses
paroisses, etc., furent éreintants. Mais le plus dur à gérer
était cette situation qui ne correspondait ni à ce que nous
en savions ni à ce que nous voulions vivre. La cohabitation
avec le foyer nous apparut très vite comme une source de tensions
et de souffrances. Nous ne nous attendions pas du tout à cela
! Avec courage, il a fallu s'organiser, préserver au mieux
l'essentiel de notre vie religieuse qui se fonde sur un climat
de silence, de prière et de paix.
Heureusement, la nouvelle présidence de l'Association
“Clos de Domois”, assurée par le professeur Marin, a beaucoup
contribué à améliorer les relations. Nous lui devons beaucoup
dans l'apaisement de ces tensions inévitables que nous étions
les premiers à déplorer. Un petit comité de modération s'est
régulièrement réuni pour aborder les difficultés concrètes
et nourrir un fructueux dialogue. La cohabitation est plus
heureuse, ce qui est une belle victoire ! Mais elle ne résout
pas toutes les difficultés.
Vivre en bonne intelligence n'empêche pas d'éprouver des
incompatibilités entre un bruyant foyer laïque, et l'apprentissage
musical des enfants (guitare électrique, batterie…) se fait
dans une salle très sonore située sous le chapelle. Nous avons
du déserter le deuxième étage, malgré nos travaux d'isolation
phonique, etc.
Mais nous n'avons pas l'intention de faire une litanie
de plaintes. C'est plus simplement un constat qui nous a mené
peu à peu à reconsidérer l'avenir. Nous savons aussi que toute
épreuve est une grâce et qu'elle peut contribuer à se recentrer
sur l'essentiel.
Ce sanctuaire et son pèlerinage sont trop importants pour
que nous abandonnions la partie. Le projet a donc mûri, en
étroite collaboration avec notre évêque et son conseil, de
fournir à notre Communauté des locaux favorisant au mieux
sa vie religieuse et l'accueil paroissial. Nous allons donc
bâtir un prieuré sur un terrain que l'évêché nous a cédé à
cet effet. D'une superficie d’un hectare, ce terrain est situé
à gauche de l'entrée du Clos de Domois (accès route de Perrigny
face à la ferme Henri Curé), juste avant l'imprimerie. Un
chemin assurera l'accès direct au prieuré qui trouvera ainsi
son autonomie.
De cette manière le mode de fonctionnement propre de chacun
sera préservé. Le diocèse s'est donc engagé dans ce projet
et l'a soutenu en nous cédant ce terrain. De notre côté, nous
nous sommes engagés à ne rien demander aux Compagnons Bâtisseurs
qui ont déjà engagé trop de projets pour financer celui-ci.
Nous comptons faire largement appel à la générosité de
tous ceux qui voudront bien soutenir notre projet et assurer
par nous-mêmes une partie des travaux afin d'en alléger le
coût. Les démarches ont été longues, nombreuses et difficiles.
Mais la grâce de Dieu aidant, les choses vont bon train. Nous
espérons (au moment où j'écris) déposer prochainement la demande
de permis de construire et commencer le gros œuvre au printemps.
Dès à présent, ce projet suscite beaucoup d'intérêt et
semble correspondre à une attente qui se fait de plus en plus
pressante. En son temps, la géniale intuition du père Chanlon
a répondu à un besoin urgent de l'époque. Il nous faut aujourd'hui
être ingénieux et docile à l'Esprit Saint pour saisir les
manques criants de notre temps afin de leur offrir une réponse
adaptée. Nous avons à cœur de faire du sanctuaire de Domois
un centre spirituel capable de faire rayonner la vitalité
de l'Evangile dont nos contemporains ont tant besoin.
Cette perspective enthousiasme notre Fraternité. Depuis
longtemps déjà, nous avons réalisé travaux et rénovations
qui ont fait de nous des moines bâtisseurs.
Nous envisageons sereinement un tel ouvrage d'autant plus
que la Providence nous a clairement conduits à travers les
événements, à affronter ce qui semble bien être un véritable
défi. Cette œuvre ne sera pas la nôtre, mais celle de Notre-Dame.
Les pères du Sacré-Cœur qui ont passé plus de cinquante
ans à Domois pour les orphelins et les enfants qui en ont
eu besoin, nous ont demandé de les accueillir dans cette maison
comme par le passé.
Nous l'avons toujours fait et nous pouvons assurer que
les Anciens seront, aussi souvent qu'ils le désirent, les
bienvenus.
Le prieuré
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Professeur
André MARIN
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LE départ des pères du
Sacré-Cœur a marqué un tournant majeur dans l'évolution du
Clos de Domois. C'était tout un esprit, une conception de
vie, un type de relation, qui risquaient de changer.
Les pères, présents depuis si longtemps, avaient marqué
profondément leur empreinte sur ces lieux. Ils étaient à la
fois les propriétaires, les gestionnaires, mais aussi les
animateurs du site de Domois. Qu'allait-il persister de tout
cela ?
Conformément aux statuts, l'Association du Clos de Domois
a été remise au père évêque de Dijon. Elle a donc poursuivi
sa tâche, mais en liaison étroite avec l'Association diocésaine.
Elle compte toujours, parmi ses administrateurs, un représentant
de l'évêque de Dijon, qui peut exercer une sorte de droit
de véto, aucune décision ne pouvant être prise sans son accord.
Cette association, ainsi renouvelée et rajeunie, a donc
tenu à continuer l'œuvre accomplie jusqu'alors, dans le même
esprit voulu par le père Chanlon et entretenu par ses successeurs.
C'est ainsi que les rapports avec nos partenaires ne se
sont pas modifiés, se poursuivant dans la même cordialité
que par le passé.
Mais les années passant, il a fallu s'adapter à l'évolution
des choses, et prendre des décisions qui ont quelque peu modifié
la vie sur le site de Domois.
Il s'agit tout d'abord de la présence et du développement
de la Fraternité de SITIO. En accord avec Mgr Michel Coloni,
évêque de Dijon, cette fraternité s'est installée dans une
partie du bâtiment principal, le “Château”.
Les frères ont ainsi récupéré les locaux antérieurement
occupés par les pères du Sacré-Cœur. Actifs et dynamiques,
plein d'idées et d'enthousiasme, ils ont fait de ces locaux
une habitation agréable, chaleureuse, complétée par des surfaces
et d'activités diverses tout-à-fait fonctionnelles.
S'étant vu confier la charge d'un vaste ensemble paroissial
(20 communes), les frères de SITIO ont occupé et rénové les
locaux paroissiaux. Ils ont enfin créé un artisanat religieux,
avec un magasin de vente installé sur place (“cuverie” du
frère Chenu).
Le Foyer éducatif et thérapeutique poursuit, de son côté,
ses activités. Sa “clientèle” se modifie peu à peu : les orphelins
et autres cas familiaux laissent de plus en plus la place
à des jeunes présentant des troubles du comportement, voire
des manifestations de délinquance. La prise en charge, toujours
d'ordre pédagogique, s'oriente aussi beaucoup vers un soutien
psychologique, voire psychiatrique. C'est d'ailleurs la Sécurité
sociale qui assure aujourd'hui le financement de l'établissement.
Enfin, depuis peu, la mixité est progressivement introduite
dans la maison, quelques filles venant se joindre à la soixantaine
de garçons jusqu'alors présents au Foyer.
La question actuellement posée est celle du maintien du
Foyer sur le site de Domois.
L'éloignement de la ville de Dijon, les frais de transport
pour des jeunes qui sont de plus en plus scolarisés dans des
écoles “normales”, les nécessaires relations avec les familles,
plaident de façon insistante pour un déménagement dans un
lieux mieux adapté. Mais les avantages ne manquent pas non
plus à la persistance du Foyer “in situ”. Aucune solution
définitive n'a été retenue pour l'instant.
Une décision grave, longuement réfléchie, a été celle
de vendre la ferme. Notre fermier, Régis Berthot, souhaitait
“se mettre à son compte”. Pour notre part, la réflexion nous
a amenés à la conclusion que cette ferme, qui fut pendant
très longtemps un des piliers du Clos de Domois, avait perdu
une grande partie de son intérêt. Cette ferme n'avait plus
aucun lien avec les jeunes reçus au foyer.
L'Association du Clos de Domois, association caritative
au service de l'Eglise, ne trouvait guère de justification
à poursuivre des tâches d'agriculture. Telle fut tout au moins
notre idée. La ferme a donc été vendue à Régis Berthot, avec
lequel nous entretenons les meilleures relations.
Par contre, le maintien de l'imprimerie nous paraissait
essentiel. Mais là encore, nous avons estimé utile d'autonomiser
un peu cette activité par rapport à l'Association. Il n'était
pas très logique, par ailleurs, que le président de l'Association
soit considéré comme un imprimeur, chef d'entreprise.
Le statut de l'imprimerie a donc été modifié, une SARL
a été créée, avec à sa tête un gérant qui assure la responsabilité
de l'entreprise. Cette imprimerie, au demeurant, reste fragile,
compte tenu de l'ancienneté du matériel, et aussi de la concurrence
serrée en ce domaine. Mais, pour l'instant, l'équilibre est
satisfaisant et nous restons optimistes pour l'avenir.
Enfin, fidèle à sa mission d'accueil et de soutien aux
plus défavorisés, l'Association du Clos de Domois continue
à loger dans ses murs un certain nombre de “locataires”. Ce
mot mérite des guillemets, car certains de ces locataires
versent un loyer réellement symbolique.
Il s'agit d'abord des quatre familles installées sur le
Clos depuis de très nombreuses années, souvent après un passage
plus ou moins long au travail d'imprimerie. Nous hébergeons
en outre l'A.P.F. (qui manipule d'importants stocks de vêtements
et de linges divers), une troupe de scouts, l'Association
paroissiale Jeanne d'Arc, une association de minéralogie…
Plus récemment, s'est installée l'Association “TRANSFERT”
: il s'agit d'une association d'insertion, destinée à favoriser
la remise au travail de jeunes chômeurs spécialisés dans l'informatique.
Le Clos de Domois demeure ainsi une terre d'accueil et de
partage, conformément à sa vocation permanente.
Pour terminer, citons deux réalisations en cours : la
Fraternité de SITIO va édifier un prieuré, magnifique projet
sur cette terre de sanctuaire marial. Nous allons donc lui
céder un terrain d’un hectare, où seront construits logements,
salles de réunion, un oratoire, ainsi qu'un accueil pour les
retraitants.
Par ailleurs, notre Association a souhaité se rapprocher
de l'Amicale des Anciens de Domois. Le président de cette
dernière, membre de notre assemblée générale, va être coopté
au sein de notre conseil d'administration, où il pourra éventuellement
assumer des responsabilités.
Ce sera une grande joie pour tous de voir les Anciens,
plus ou moins éloignés du Clos pendant un moment, revenir
sur cette terre. Ce sera aussi comme un juste retour des choses
: ceux qui ont passé une partie de leur enfance au Clos s'y
retrouvent aujourd'hui en adultes et participent désormais
à la gestion de ces lieux auxquels ils demeurent profondément
attachés.
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